dimanche 23 octobre 2011

Abercrombie and Fitch, le vilain Americain

Il y a déjà des années que les enfants de l'upper middle class française demandent à leurs parents, lorsqu'ils partent en voyage d'affaires aux Etats-Unis, de leur ramener des habits de Abercrombie and Fitch.

En mai 2011, la marque s'est installée sur les Champs-Elysées. Enfin ! Comme s'exclament tous les blogs de fashion-victims.
Enfin, vos enfants vont pouvoir participer sur place à la destruction de la civilisation, avec votre argent.
Oh, goody goody !

A la fin du XIXème siècle M. David Abercrombie rencontra M. Ezra Fitch et ensemble ils ouvrirent à Manhattan une boutique d'équipements de luxe pour les excursions de pêche et de chasse de l'upper class.
Cette entreprise prospéra en vendant sur catalogue des casques coloniaux, des cannes à pêche et des fusils à éléphants, toutes choses qui finirent par se démoder dans les années 60, jusqu'à mener à la faillite en 1976.

Le nom et le fichier des clients changèrent de mains plusieurs fois. And then, in 1992, came Mike Jeffries.
La société propriétaire d'A&F, The Limited, basée dans l'Ohio, nomma Jeffries pour "revamper" la marque, comme on dit en anglais, et pour revamper, il a revampé...

Je vous épargne de longs développements sur la stratégie du branding, on peut lire la réédition mise à jour de No Logo, de Naomi Klein. Les campagnes de publicité de A&F sont un modèle du genre.

M. Jeffries a un idéal de beauté disons réducteur. Son idéal doit être grand et beau et costaud, et blanc, et blond, et glabre. Et riche. Et de préférence, patriote.
Les sujets sont surtout masculins et me rappellent irrésistiblement les Hitler Jungend. Sauf que ces derniers étaient plus habillés.

Car, deuxième particularité, les publicités de A&F ne montrent pas les habits. Leurs modèles sont pratiquement à poil. Ils s'habillent chez tout-nu, comme disait mon grand-père.

Le système pavlovien est bien connu : associer solidement dans le cerveau la marque Abercrombie & Fitch avec des visions de sexe et de nudité. Très efficace particulièrement chez les adolescents victimes impuissantes (si j'ose dire) de leurs bas instincts. Ici, message spécial : Jeune homme, acheter très cher un t-shirt Abercrombie and Bitch ne te donnera pas magiquement les abdos du type sur la photo, ni sa (supposée) vie sexuelle. Quoique.
Car si l'objet de ta concupiscence est elle/lui aussi fan des campagnes A&F, et associe illico la vue du logo sur ton t-shirt à des idées de sexe et de nudité... Ca peut le faire...

Dans les années 2000, le photographe Bruce Weber, connu pour sa pornographie chez Calvin Klein, fait du catalogue A&F un classique de l'homo-érotisme, et un ornement de choix des tables basses dans les intérieurs gay, au point d'alarmer les incontournables ligues de vertu américaines. Tout en publiant un catalogue interdit aux moins de 18 ans sous plastique opaque, la direction de la marque assure que les photos de jeunes Apollons nus se roulant les uns sur les autres ne font que dépeindre "l'esprit de camaraderie si caractéristique des valeurs américaines".
Je vous laisse juger...
Personnellement je me fais du souci pour ces jeunes gens : sont-ils rasés de force ou épilés à la cire ? L'absence du moindre poil est si évidente que Google associe ces photos avec des publicités pour l'épilation au laser !

Anyway, la progression commerciale fulgurante de A&F n'est qu'une longue suite de scandales, procès, boycotts et autres indignations publiques, les valeurs soi-disant véhiculées par la marque, la beauté et l'insouciance de la jeunesse, étant plutôt pour beaucoup un racisme et un sexisme rarement assumés avec autant d'arrogance. Il y a même un livre entier consacré à la question :  Why I Hate Abercrombie & Fitch : Essays on Race and Sexuality par un certain Dwight A. McBride.

La sordide ironie de l'affaire est que ce "modèle" physique qui exclut à peu près 99% de la population des Etats-Unis comme d'ailleurs est connu sous le nom de "All American"...

Mais tout ceci n'est pas le plus grave et nos enfants de riches n'ont qu'à développer une résistance à la publicité ou bien mourir de faim ruinés par leur addiction à la société de consommation. I don't really care.

Le problème est ailleurs.
Il n'y a pas grand monde parmi les indignés des universités "libérales" aux Zétazunis qui se soit penché sur les produits vendus par Abercrombie & Fitch.

Il faut dire qu'on ne les voit jamais ! Ni sur les publicités, ni dans les boutiques, où il fait noir. Car c'est un autre gimmick de la marque que d'ouvrir sur les plus prestigieuses avenues du monde des boutiques géantes qui ressemblent à ces discothèques cathédrales qui sévissaient dans les années 70, style studio 54, avec de la musique à fond et bien sûr des beautiful people dénudés comme vendeurs et vendeuses, qui ne font pas l'objet d'une procédure de recrutement mais d'un "casting" dans un esprit d'insouciante camaraderie qui fait fi du code du travail.

Finalement les habits quand on prend la peine d'aller les voir sur le catalogue sont très quelconques, c'est ce qu'on appelle le style preppie en anglais, une espèce de mélange de minet et de bûcheron canadien. Polos, pulls torsadés, jupes plissées, chemises à carreau et jeans déchirés. Plus une étrange obsession pour les tongs.
Le tout quatre fois plus cher qu'aux Trois Suisses.

Bien, et alors, d'où viennent ces vêtements ? Comment et par qui sont-ils fabriqués ? Voila qui est beaucoup plus difficile à savoir. C'est là que le bât blesse vraiment, et même tue parfois.
Tout comme Wal Mart, Carrefour ou H&M, Abercrombie fait fabriquer ses produits par des esclaves dans le tiers-monde. La différence, c'est qu'il n'a même pas l'excuse de vendre à bas prix.

Ashulia, Bengladesh
Quelques campagnes organisées par les admirables associations Clean Clothes et Change.org nous éclairent sur les conditions de production. On sait que toutes les marques de confection que nous connaissons sous-traitent la fabrication, ou plutôt l'assemblage des vêtements à des entreprises principalement asiatiques qui emploient des ouvrières dans des sweat-shops, ateliers installés dans des zones franches où personne ne paie d'impôts. Si quelqu'un se plaint des conditions de travail, a l'idée de la ramener en formant un syndicat ou en ameutant la presse, il suffit de rompre le contrat et de passer commande ailleurs. Le sous-traitant fait faillite, ses responsables disparaissent dans la nature, et voila !

En 2010 Abercrombie a figuré dans le Sweatshop Hall of Shame, établi par l'International Labor Rights Forum, en compagnie de Hanes, Ikéa, Pier Import, et bien sûr Walmart.  Cette liste, je cite, "highlights the most abhorrent of companies."
"Ces entreprises emploient des travailleurs qui triment de longues heures dans des conditions dangereuses pour des salaires de misère. Lorsque ces travailleurs tentent de former un syndicat pour exprimer collectivement leurs difficultés, ils sont menacés par leur direction, et risquent d'être licenciés ou même battus. Ces entreprises utilisent des fournisseurs qui emploient des pratiques illégales pour supprimer les droits des travailleurs."

Partout dans le monde les syndicalistes sont menacés de licenciement, et les droits des travailleurs sont mis à mal, c'est vrai. Mais ce n'est pas tout à fait le même niveau. Un exemple : connaissez-vous Saipan ?

Saipan est la plus grande des quatorze îles qui forment l'archipel des Mariannes du Nord, dans l'océan Pacifique. Elles font partie du commonwealth des Etats-Unis.
Saipan abrite une industrie de la confection d'un volume de plus d'un milliard de dollars. Une trentaine d'usines emploient plus de 10.000 travailleurs, la plupart des jeunes femmes originaires de Chine, des Philippines, de Thaïlande, du Viet-Nam ou du Bengladesh.

En 1999, les travailleurs de Saipan associés à plusieurs ONG ont réussi à porter plainte contre des dizaines de grands noms du prêt-à-porter. Le contenu de la plainte est édifiant.
Les employés, logés dans des conditions déplorables, travaillaient douze heures par jour, sept jours par semaine. Ils étaient payés 3,05 dollars de l'heure, sans paiement des heures supplémentaires. Mais en réalité ils n'étaient pas payés du tout, car les recruteurs qui leur avaient fait miroiter des super conditions de travail "aux Etats-Unis", leur avaient d'abord extorqué jusqu'à 7000 dollars de commission pour être embauchés.
De nombreux travailleurs ont aussi témoigné qu'ils avaient signé des contrats "fantômes" par lesquels ils renonçaient à des droits élémentaires comme adhérer à un syndicat, assister à des services religieux, se marier, ou même démissionner ! De toutes façons, ils n'avaient pas les moyens de rentrer chez eux, et leurs passeports étaient confisqués. La conclusion des avocats des plaignants est la même que la vôtre : esclavage.
Comble de cynisme, les employeurs ont été également accusés de publicité mensongère, pour avoir utilisé des étiquettes "Made in the USA",  et fait la promotion de leur produits comme étant fabriqués dans des conditions éthiques !

Après cinq ans de bataille judiciaire, 23 fabriques de Saipan et 26 détaillants ont versé 20 millions de dollars d'indemnité à titre de "réglement amiable" (settlement), et ont promis de cesser leurs abus les plus grossiers.
Parmi les entreprises américaines concernées se trouvent Abercrombie, Calvin Klein, Donna Karan, Gap, J. Crew, Liz Claiborne, HoshKosh, Polo Ralph Lauren, Tommy Hilfiger.
Le seul qui a refusé jusque au bout de participer au fond d'indemnisation est Levi's, un autre très vilain Américain.

En 2010, l'organisation Clean Clothes est entrée dans un nouveau bras de fer avec Abercrombie, au sujet d'une fabrique qui avait fermé "inopinément" au Cambodge en 2008, sans payer les salaires ni les indemnités de licenciement. Sous la pression de l'ONG, les autres clients de cette société, Gap (encore !) a accepté de payer "une partie" des indemnités, et Target a proposé 5 dollars par personne, ce qui a été refusé par le syndicat... Seul Abercrombie a fait le mort.

Je traduis ce que Clean Clothes a à dire sur la question :
"En termes de responsabilité sociale des entreprises, Abercrombie and Fitch est l'une des plus conservatrices parmi les entreprises occidentales de prêt-à-porter. La marque à la mode n'a pas de code de conduite concernant ses relations avec les fabriques auxquelles elle sous-traite sa production, et en général manque de transparence au sujet de sa politique d'approvisionnement. La société a également refusé de dialoguer avec Clean Clothes au sujet de sa responsabilité sociale."

En janvier 2011 c'est Change.org qui se fâche.
Le 15 décembre 2010, 28 travailleurs ont péri dans l'incendie d'un atelier à Narsinghapur, au Bengladesh. Ils étaient payés 24 dollars par mois. Le salaire minimum légal du Bengladesh est de 42$ par mois.

Ils fabriquaient des vêtements pour Abercrombie, Gap, JC Penney, Target, Wrangler, Calvin Klein, Tommy Hilfiger. Les suspects habituels.

Cinq de ces sept compagnies ont accepté de travailler avec un consortium d'associations de défense des droits des travailleurs pour indemniser les victimes et exiger de leurs fournisseurs de meilleures conditions de sécurité.

Abercrombie et Target ont répondu qu'ils examineraient des options de compensation, et ont suggéré des programmes de formation des travailleurs à la sécurité. Quand on voit l'état des bâtiments, suggérer que la sécurité est la responsabilité des employés, c'est toujours la vieille technique : blame the poor for hunger.

L'association a publié un article fort énervé intitulé "Abercrombie and Target ignore more than 65000 Change.org members." Apparemment en vain.
Depuis JC Penney a abandonné le programme. Après une nouvelle pétition de plus de 100.000 signatures, la firme a accepté en octobre 2011 de signer des engagements. L'histoire n'est pas terminée...

All American, indeed... Notons que les Européens ne font pas mieux, il y a seulement encore moins d'organisations pour les dénoncer. L'association Ethique sur l'étiquette est l'émanation française de Clean Clothes. Elle a traduit en français un rapport de cette organisation sur la grande distribution, dont Carrefour et Lidl : http://www.ethique-sur-etiquette.org/IMG/pdf/1-2_Rapport_Cash.pdf

MISE A JOUR 24 JUILLET 2013 : Employés et ex-employés de Abercrombie Paris, c'est le moment de témoigner : http://obsession.nouvelobs.com/mode/20130724.OBS0849/le-defenseur-des-droits-va-enqueter-sur-abercrombie.html

MISE A JOUR 9 FEVRIER 2014 : Mike Jeffries menacé de licenciement par son conseil d'administration : http://nymag.com/thecut/2014/02/why-abercrombie-is-losing-its-shirt.html

Sources :
Naomi Klein : No Logo, new edition Picador 2010, édition française Babel 2002
http://www.greenamerica.org/programs/responsibleshopper/company.cfm?id=178
http://www.la-vie-en-mode.fr/evenement/abercrombie-fitch-magasin-paris/
http://www.salon.com/life/feature/2006/01/24/jeffries/index.html
http://retailindustry.about.com/od/frontlinemanagement/a/AbercrombieFitchMikeJeffriesquotes.htm
http://www.puretrend.com/marque/abercrombie-fitch_b4294959752/communication_i3/1
http://jezebel.com/5208199/finally-teens-dont-like-or-want-to-be%E2%80%94girls-who-wear-abercrombie--fitch
http://www.zimbio.com/Abercrombie+and+Fitch+Clothing/articles/19/Abercrombie+Fitch+Clothings+Brand+Marketing
http://laborrights.org/creating-a-sweatfree-world/sweatshops/resources/12211
http://www.cleanclothes.org/newslist/617-saipan-sweatshop-lawsuit-ends-with-important-ga
http://www.cleanclothes.org/urgent-actions/us-brands-on-the-spot-over-factory-closure-in-cambodia
http://news.change.org/stories/abercrombie-and-target-ignore-more-than-65000-changeorg-members
http://www.thedailystar.net/newDesign/news-details.php?nid=166145
http://www.change.org/petitions/jc-penney-dont-break-your-promise-to-families-of-workers-who-died-making-your-clothes

vendredi 14 octobre 2011

Bonne nouvelle pour les blogueurs français

Bravo à M. Bardet, qui après avoir été condamné en première instance et en appel, s'est obstiné jusqu'à voir la Cour de Cassation lui donner raison, et juger que les abus de la liberté d'expression ne peuvent être réprimés que par la loi de 1881 sur la liberté de la presse. Cette règle s'applique à tout moyen de communication au public par voie électronique, même si l'auteur est anonyme.

Reste à étudier la loi sur la liberté de la presse, avant de dire complètement n'importe quoi...

L'histoire :

Les faits remontent à la dernière campagne pour les élections municipales. Un internaute s'amusait alors à tourner en dérision la politique de Serge Grouard, maire (UMP) d'Orléans et député du Loiret, sur un blog baptisé"Les amis de Serge Grouard". Le site en question était anonyme et n'indiquait pas l'identité de son auteur. L'élu local n'a pas vraiment goûté cet humour. À son initiative, une expertise a été menée pour découvrir quelle personne se cachait derrière ce blog. L'enquête a permis de remonter jusqu'à Antoine Bardet, qui figurait sur une liste électorale de gauche aux municipales.

Le maire lui a demandé réparation en justice.

Une procédure au civil

Serge Grouard demandait des dommages et intérêts, la fermeture du blog litigieux et la publication de la décision sur le blog sur le fondement de l'article 1382 du code civil, base de la responsabilité civile, qui dispose que "tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer".

Il a obtenu gain de cause à deux reprises. En octobre 2008, l'internaute plaisantin a été condamné à lui verser 7 400 euros en guise de réparation du préjudice subi. En mars 2010, la cour d'appel d'Orléans a tranché dans le même sens, estimant que les écrits cherchaient effectivement à discréditer M. Grouard auprès de ses électeurs.

Mais la Cour de cassation n'a pas rejoint ces avis.

Une situation relevant de la liberté de la presse

Elle considère qu'il y a eu erreur sur le texte appliqué. Selon elle, la disposition pertinente en la matière n'était pas l'article 1382 du code civil. En effet, l'arrêt rappelle que "les abus de la liberté d'expression ne peuvent être réprimés que par la loi du 29 juillet 1881" sur la liberté de la presse, qui met en place un régime procédural particulier, dérogeant au droit commun.

Cette jurisprudence, qui n'est pas nouvelle, se fonde sur une loi de 2004(2) qui étend les dispositions de la loi sur la liberté de la presse à "tout moyen de communication au public par voie électronique" ce qui inclut bien sûr les blogs.

La cour d'appel avait refusé de faire bénéficier le blogueur des avantages de cette loi car, selon elle, s'il y avait bien volonté de discréditer le maire, il n'y avait pour autant ni injure ni diffamation, qui sont les infractions règlementées par ladite loi. Elle considérait également que M. Bardet ne pouvait pas invoquer les avantages de la loi sur la liberté de la presse sans se plier à ses devoirs, qui sont de s'indentifier formellement aux yeux du public.

La Cour de cassation, et c'est l'apport en droit de cette décision, considère qu'à partir du moment où il y a abus de la liberté d'expression sur un blog, c'est la loi du 29 juillet 1881 qui doit être appliquée, que l'auteur soit identifiable immédiatement sur sa publication ou non, que l'injure et la diffamation soient caractérisées ou non.



Pour les plaideurs, voici l'arrêt (lapidaire) de la Cour.



Arrêt n° 904 du 6 octobre 2011 (10-18.142) - Cour de cassation - Première chambre civile

http://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/premiere_chambre_civile_568/904_6_21187.html


Cassation sans renvoi


Demandeur(s) : M. Antoine X...
Défendeur(s) M. Serge Y...

Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches :
Vu l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu que reprochant à M. X... d’être l’auteur d’un blog le dénigrant, M. Y..., agissant tant en son nom propre qu’en ses qualités de maire d’O... et de député du L..., l’a assigné en référé, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, en paiement de dommages intérêts, fermeture du blog litigieux et publication de la décision ; que l’arrêt attaqué a accueilli cette demande ;
Attendu que pour rejeter le moyen de défense de M. X... tendant à l’application aux faits litigieux des dispositions de la loi du 29 juillet 1881, l’arrêt attaqué énonce que le contenu du blog de M. X..., qui a agi de façon anonyme et sous une présentation trompeuse, cherche effectivement à discréditer M. Y... auprès des électeurs, mais que cette entreprise ne repose que sur une présentation générale le tournant en ridicule à travers le prisme caricatural d’une vision orientée et partiale de sa politique locale ou de sa personnalité sans imputer spécialement au maire, ou au candidat, de faits précis de nature à porter, par eux-mêmes, atteinte à son honneur ou à sa considération ;
Qu’en statuant ainsi alors que dans son assignation M. Y... reprochait à M. X... de l’avoir dénigré dans des termes de nature à lui causer un préjudice et que les abus de la liberté d’expression ne peuvent être réprimés que par la loi du 29 juillet 1881 la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu que conformément à l’article 411 3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire, la Cour de cassation est en mesure de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 22 mars 2010, entre les parties, par la cour d’appel d’ Orléans ;
DIT n’y avoir lieu à renvoi ;
Déclare l’action prescrite

Président : M. Charruault
Rapporteur : Mme Crédeville, conseiller
Avocat général : M. Domingo
Avocat(s) : Me Spinosi ; SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard