L'antanaclase elliptique est une petite bête charmante une fois qu'on a appris à la connaître.
Non ce n'est pas une bactérie infectieuse, juste une figure de style.
L'antanaclase, nous dit wikipedia, est un mot qui vient du grec "anti" et "anaklasis" qui signifie répercussion. Elle consiste à produire un effet le plus souvent humoristique, en répétant le même mot, mais avec deux sens différents.
L' exemple classique n'est pas humoristique, justement : "le coeur a ses raisons que la raison ne connaît point."
Dans la première partie de la phrase, raisons = motifs, dans la deuxième partie, raison = jugement.
J'en profite pour rappeler que la citation est de Blaise Pascal.
Cela peut être la répétition d'un mot qui est seulement un homonyme, comme dans : "Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon église", citation biblique.
Un spot récent de la sécurité routière est presque entièrement basé sur des antanaclases, même si elle ne sont pas des plus subtiles :
Tant qu’il y aura trop d’alcool dans le sang d’un conducteur, il y aura du sang sur les routes…
Tant qu’un conducteur ratera un virage parce qu’il n’a pas voulu rater un appel, on appellera une ambulance…
Tant qu’un véhicule de trois tonnes ignorera un scooter de cent kilos, il y aura des tonnes de dégâts…
Tant qu’on tournera sans faire attention à l’angle mort, il y aura des morts dans l’angle mort…
Tant que la vitesse inscrite sur les compteurs dépassera celle inscrite sur les panneaux, les accidents ne ralentiront pas…
A noter que la dernière est basée sur un couple de mots qui ne sont pas homonymes mais antonymes, c'est à dire de sens contraire, "vitesse" et "ralentir".
Un autre exemple : Elle lui avait certes donné la vie, mais son fils, le docteur, ne la lui a pas rendue.
Pour alléger, on peut citer : l'existence précède l'essence, et l'essence est de plus en plus chère.
Ou bien : la droite est gauche et la gauche maladroite.
Beaucoup plus répandue et réjouissante est l'antanaclase dans laquelle la deuxième partie n'est que suggérée. Elle est dite alors elliptique.
C'est la base d'une grande partie de ce que l'on appelle communément les calembours, ou mots d'esprit.
On songe tout de suite à Raymond Devos : "Se coucher tard nuit."
"Quand la lune est argentée mon percepteur rapplique".
Et à San Antonio : "La lumière d'été plus rasante qu'un discours électoral".
"Comment trouves-tu mes fesses ? - Très facilement !"
Personnellement j'adore "l'orchestre attaqua l'hymne national qui se défendit bien", mais je n'ai pas retrouvé l'auteur.
La plupart des blagues sur le modèle "Quelle différence (ou ressemblance) entre..." sont basées sur une antanaclase elliptique.
La culture c'est comme la confiture, moins on en a plus on l'étale.
L'intelligence c'est comme les parachutes, quand on n'en a pas on s'écrase. (Pierre Desproges)
Quand il fait beau le linge sèche, les étudiants aussi.
En réalité la définition stricte de l'antanaclase est une figure de style basée sur deux sens propres du même mot. La même figure, lorsqu'elle est basée sur l'emploi d'un sens propre et d'un sens figuré, comme dans les deux derniers exemples, était appelée syllepse, mais cette distinction tend à être abandonnée.
Une fois que l'on maîtrise le concept, comme disent les cuistres, on commence à voir des antanaclases partout. On peut aussi en fabriquer bien sûr.
Plus difficile (fig. 3), antanaclase elliptique en anglais (ça se dit antanaclasis). Elle est basée sur deux sens différents du verbe "get", certainement l'un des mots les plus polysémiques du monde.
Un autre verbe polysémique est utilisé dans ce célèbre limerick pornographique, que je n'expliquerai pas aux non initiés :
There once was a man from East Kent
Whose tool was so long that it bent
To save her some trouble
He folded it double
And instead of coming he went
Plus sérieux, un baratin du philosophe Michel Serres qui tourne autour du sujet, en podcast : http://www.franceinfo.fr/education-jeunesse/le-sens-de-l-info/l-antanaclase-751981-2012-09-30
Bizarrement ce n'est pas cette émission qui a inspiré ce billet, je l'ai découverte après.
L'avantage de l'humour, c'est qu'il permet de faire n'importe quoi, contrairement à disons la poésie parnassienne. Il y a des antanaclases qui reposent non pas sur deux sens du même mot mais sur une simple homophonie.
Frédéric Dard encore : "De deux mots il faut choisir le pire."
"Ah si les hommes s'aidaient ! Si les femmes cédaient !"
Enfin, une antanaclase visuelle, très élégante, qui rappelle la fameuse traduction de facebook par le traducteur de Google : "Toi aussi deviens un ventilateur !".
Mais c'est une autre histoire, et une autre catégorie comique altogether...
Non ce n'est pas une bactérie infectieuse, juste une figure de style.
L'antanaclase, nous dit wikipedia, est un mot qui vient du grec "anti" et "anaklasis" qui signifie répercussion. Elle consiste à produire un effet le plus souvent humoristique, en répétant le même mot, mais avec deux sens différents.
L' exemple classique n'est pas humoristique, justement : "le coeur a ses raisons que la raison ne connaît point."
Dans la première partie de la phrase, raisons = motifs, dans la deuxième partie, raison = jugement.
J'en profite pour rappeler que la citation est de Blaise Pascal.
Cela peut être la répétition d'un mot qui est seulement un homonyme, comme dans : "Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon église", citation biblique.
Un spot récent de la sécurité routière est presque entièrement basé sur des antanaclases, même si elle ne sont pas des plus subtiles :
Tant qu’il y aura trop d’alcool dans le sang d’un conducteur, il y aura du sang sur les routes…
Tant qu’un conducteur ratera un virage parce qu’il n’a pas voulu rater un appel, on appellera une ambulance…
Tant qu’un véhicule de trois tonnes ignorera un scooter de cent kilos, il y aura des tonnes de dégâts…
Tant qu’on tournera sans faire attention à l’angle mort, il y aura des morts dans l’angle mort…
Tant que la vitesse inscrite sur les compteurs dépassera celle inscrite sur les panneaux, les accidents ne ralentiront pas…
A noter que la dernière est basée sur un couple de mots qui ne sont pas homonymes mais antonymes, c'est à dire de sens contraire, "vitesse" et "ralentir".
Un autre exemple : Elle lui avait certes donné la vie, mais son fils, le docteur, ne la lui a pas rendue.
Pour alléger, on peut citer : l'existence précède l'essence, et l'essence est de plus en plus chère.
Ou bien : la droite est gauche et la gauche maladroite.
Beaucoup plus répandue et réjouissante est l'antanaclase dans laquelle la deuxième partie n'est que suggérée. Elle est dite alors elliptique.
C'est la base d'une grande partie de ce que l'on appelle communément les calembours, ou mots d'esprit.
On songe tout de suite à Raymond Devos : "Se coucher tard nuit."
"Quand la lune est argentée mon percepteur rapplique".
Et à San Antonio : "La lumière d'été plus rasante qu'un discours électoral".
"Comment trouves-tu mes fesses ? - Très facilement !"
Personnellement j'adore "l'orchestre attaqua l'hymne national qui se défendit bien", mais je n'ai pas retrouvé l'auteur.
La plupart des blagues sur le modèle "Quelle différence (ou ressemblance) entre..." sont basées sur une antanaclase elliptique.
La culture c'est comme la confiture, moins on en a plus on l'étale.
L'intelligence c'est comme les parachutes, quand on n'en a pas on s'écrase. (Pierre Desproges)
Quand il fait beau le linge sèche, les étudiants aussi.
En réalité la définition stricte de l'antanaclase est une figure de style basée sur deux sens propres du même mot. La même figure, lorsqu'elle est basée sur l'emploi d'un sens propre et d'un sens figuré, comme dans les deux derniers exemples, était appelée syllepse, mais cette distinction tend à être abandonnée.
Une fois que l'on maîtrise le concept, comme disent les cuistres, on commence à voir des antanaclases partout. On peut aussi en fabriquer bien sûr.
Plus difficile (fig. 3), antanaclase elliptique en anglais (ça se dit antanaclasis). Elle est basée sur deux sens différents du verbe "get", certainement l'un des mots les plus polysémiques du monde.
Un autre verbe polysémique est utilisé dans ce célèbre limerick pornographique, que je n'expliquerai pas aux non initiés :
There once was a man from East Kent
Whose tool was so long that it bent
To save her some trouble
He folded it double
And instead of coming he went
Plus sérieux, un baratin du philosophe Michel Serres qui tourne autour du sujet, en podcast : http://www.franceinfo.fr/education-jeunesse/le-sens-de-l-info/l-antanaclase-751981-2012-09-30
Bizarrement ce n'est pas cette émission qui a inspiré ce billet, je l'ai découverte après.
L'avantage de l'humour, c'est qu'il permet de faire n'importe quoi, contrairement à disons la poésie parnassienne. Il y a des antanaclases qui reposent non pas sur deux sens du même mot mais sur une simple homophonie.
Frédéric Dard encore : "De deux mots il faut choisir le pire."
"Ah si les hommes s'aidaient ! Si les femmes cédaient !"
Enfin, une antanaclase visuelle, très élégante, qui rappelle la fameuse traduction de facebook par le traducteur de Google : "Toi aussi deviens un ventilateur !".
Mais c'est une autre histoire, et une autre catégorie comique altogether...
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