PARIS, 25 fév 2009 (AFP) - Une variation génétique expliquerait les différences de regard porté sur les aléas de la vie, par ceux qui voient le verre à moitié vide et ceux qui le voient à moitié plein, selon une étude publiée mercredi par des chercheurs britanniques. Il était déjà établi que le gène 5-HTTLPR contrôlait le taux de sérotonine, une molécule qui transmet les messages chimiques à l'intérieur du système nerveux central et qui est impliquée notamment dans le sommeil ou la dépression. Nombre d'antidépresseurs régulent les niveaux de sérotonine. Des chercheurs avaient aussi déjà identifié trois variants du gène, dont deux allèles (version particulière d'un gène) courts liés à un plus grand risque de dépression et de tentatives de suicide et qui, supposait-on, suscitaient une réponse neurochimique exagérée à des situations stressantes. Le gène pouvait aussi avoir pour variant un allèle long. Des chercheurs de l'Université d'Essex (Grande-Bretagne), conduits par Elaine Fox et dont les travaux sont publiés dans la revue "Proceedings of the Royal Society B", ont essayé d'établir si les réactions des gens avaient à voir avec ces allèles. L'équipe a projeté à 97 personnes une série d'images, montrées par deux, extraites d'un test psychologique international. Les images étaient divisées en trois catégories : négatives (susceptibles d'inspirer peur ou stress, telles des images d'araignée ou d'une personne prête à se suicider), érotiques ou agréables, et enfin neutres. Chacune des deux images sur chaque diapositive provenait d'une catégorie différente. Les 16 participants qui avaient un long allèle se sont intéressés aux images agréables, se détournant en revanche de celles qui étaient inquiétantes. Ceux qui avaient des allèles courts ne manifestaient pas cette tendance, mais étaient moins déterminés dans leurs choix. Les chercheurs ont estimé que les allèles longs constituaient une "distorsion protectrice" permettant de "mieux réagir aux stress de la vie", et que leur absence était probablement liée à une plus grande vulnérabilité aux troubles d'humeur et à l'anxiété.
mh/chc/bb/ej AFP251541 FEV 09
Qu'est-ce à dire ? "Une plus grande vulnérabilité aux troubles d'humeur et à l'anxiété" ? "une réponse neurochimique exagérée à des situations stressantes" ? Mais c'est moi ! Aurais-je l'allèle trop court ?
J'entamai aussitôt les recheches. Je découvris sans tarder que l'article original ne me disait rien du tout : 5-HTTLPR genotype and anxiety-related personality traits: A meta-analysis and new data.
Essayons quelque chose de légèrement plus accessible :SOURCE INSERM
Gène du transporteur de la sérotonine
Il existe deux polymorphismes VNTR dans le gène SLC6A4 du transporteur de la sérotonine. Le premier est situé en amont de la région codante dans une région qui contrôle la transcription (5-hydroxytryptamine transporter-linked polymorphic region = 5-HTTLPR) et le second est situé dans le deuxième intron. Les deux allèles du polymorphisme 5-HTTLPR sont une insertion de 44 pb (type L) et une délétion (type S). L'allèle S induit une diminution de l'activité de transcription par rapport à l'allèle L, ce qui induit une fonction diminuée du génotype S/S par rapport aux génotypes L/S et L/L (Heils et coll., 1996).
Une association entre l'homozygotie (10/10) et une addiction précoce aux opiacés ainsi qu'une protection avec le génotype 12/10 ont été décrites (Galeeva et coll., 2002). Une association a été rapportée entre le tabagisme et l'allèle L du 5-HTTLPR (Ishikawa et coll., 1999) dans une population japonaise, mais cette association n'a pas été retrouvée dans une population caucasienne et afro-américaine. Il existe d'importantes différences de distribution des génotypes 5-HTT entre les groupes raciaux ; les Caucasiens sont plus fréquemment porteurs de l'allèle court (Lerman et coll., 1998b). Le polymorphisme 5-HTTLPR en interaction avec le neuroticisme était statistiquement significatif pour la prise de nicotine, la dépendance à la nicotine, et les motivations à fumer, chez les fumeurs possédant les génotypes S/S et S/L. Les sujets avec neuroticisme et le génotype S/S avaient beaucoup plus de difficultés à s'arrêter (Hu et coll., 2000). Le génotypage de 5-HTTLPR pourrait permettre d'identifier les fumeurs qui répondraient mieux à des médications psychotropes comme les inhibiteurs de recapture de la sérotonine (SSRI) (Lerman et coll., 2002). Les sujets porteurs d'un ou deux allèles S présentaient une activité cérébrale supérieure face à des images inspirant la frayeur. Cette étude montre une association entre un transporteur de la sérotonine moins performant et une augmentation de l'anxiété (Hariri et coll., 2002).
Cet article, bien qu'assez éclairant, ne m'a pas tout-à-fait convaincue. Je me suis lancée dans la lecture exhaustive de tous les articles en alphabet romain de Google pour 5-HTTLPR. Il y en a 582. L'avantage avec un nom pareil, c'est qu'il n'y a pas d'homonyme.
Le résultat est édifiant.
Je vous épargne les articles entiers, voici des extraits qui disent tout et le contraire :
Les résultats montrent que l’un des deux allèles (allèle « s ») du gène 5-HTTLPR confère une vulnérabilité à la dépression ou aux troubles thymiques, ...linkinghub.elsevier.com/retrieve/pii/S0003448705002945
European Journal of Human Genetics (2004) 12, 377–382. doi:10.1038/sj.ejhg.5201149 Published online 21 January 2004
Serotonin transporter 5HTTLPR polymorphism and affective disorders: no evidence of association in a large European multicenter study
The serotonin transporter 5-HTTPR polymorphism is associated with current and lifetime depression in persons with chronic psychotic disorders
M.Psychiatric Genetics Research Center, Department of Psychiatry,University of Texas Health Science Center at San Antonio, San Antonio, TX, USA. Acta Psychiatr Scand. 2008 Nov 11.
Serotonin transporter gene polymorphism (5-HTTLPR) in patients ... - Recent findings have demonstrated that depression and stress are influenced by polymorphism of the promoter region of 5-HTT (5-HTTLPR)
The relationship between stressful life events, the serotonin transporter (5-HTTLPR) genotype and major depression.
Psychol Med, Vol. 35, No. 1. (January 2005), pp. 101-111. CONCLUSIONS : Regardless of whether our results were based on binary logistic or ordinal regression analyses we found no evidence to support a main effect of 5-HTTLPR, or an interaction between the 5-HTTLPR genotype and stressful life events on major depression
Biological Psychiatry - Official journal of the Society of Biological Psychiatry Volume 59, Issue 3, Pages 224-229 (1 February 2006) Social Adversity, the Serotonin Transporter (5-HTTLPR) Polymorphism and Major Depressive Disorder
Background
Recent evidence has suggested that the short allele of the serotonin transporter (5-HTT) gene-linked polymorphic region (5-HTTLPR of the human serotonin gene [SLC6A4]) is associated with increased risk of depressive disorder but only among individuals exposed to social adversity. We report an investigation designed to replicate this finding.
Methods
Data were available from a non-clinical sample of 4175 adult men and women, ages 41–80 years, selected from participants in the European Prospective Investigation into Cancer and Nutrition in Norfolk (EPIC-Norfolk, United Kingdom) study. Evidence of past-year prevalent episodic major depressive disorder (MDD), defined by restricted DSM-IV diagnostic criteria, was assessed through questionnaire. Adverse experiences in childhood and in adulthood (during the five years preceding assessment) were also assessed through self-report. The 5-HTTLPR variant was genotyped according to published protocols.
Results
One-year prevalent MDD criteria were met by 298 study participants. The experience of social adversity (both in childhood and adulthood) was strongly associated with increased rates of past-year prevalent MDD. No gene by environment (GxE) interactions between the 5-HTTLPR genotype, social adversity, and MDD were observed.
Conclusions
This study has not replicated a previous finding of a GxE interaction between the 5-HTTLPR genotype, social adversity, and depression.
Expertise Collective Inserm
© Les Editions INSERM, 2005
l'allèle court (« s ») du polymorphisme d'insertion/ délétion du promoteur du gène du transporteur de la sérotonine (5-HTTLPR) présente une fréquence augmentée chez les suicidants par rapport aux témoins, avec en moyenne 50 % d'allèle « s » chez les suicidants violents contre 30 à 35 % chez les témoins.
5HTTLPR polymorphism in schizophrenic patients: further support for association with violent suicide attempts. Am J Med Gen. In press 2003. ...
We did not find any association of 5-HTTLPR gene with mortality, nor with suicide attempt. We also found that the C allele of the 5-HT1b gene was found in ...www.ireb.com/publications/cahiers/Cahiers%20n%B018.pdf -
MUNAFO (Marcus-R) : Lack of association of 5-HTTLPR genotype with smoking cessation in a nicotine replacement therapy randomized trial. (2006) ...www.bdsp.ehesp.fr/base/scripts/SearchA.bs?bqEquation=AUT=%22MUNAFO++M*%
Aims: The short (S) allele of the serotonin transporter gene promoter polymorphism (5-HTTLPR) contributes to the risk of alcohol dependence and co-occurring ...qualis.univ-lille2.fr/index.php?option=com_content&task=view&id=1156136&Itemid=88888893
Lack of evidence for association between serotonin transporter gene (5-HTTLPR) and obsessive-compulsive disorder by case control and family association ...arerp.org/publications.htm -
Panic disorder and serotoninergic genes (5-HTTLPR, HTRIA and HTR2A ... -
Panic disorder and serotoninergic genes (5-HTTLPR, HTRIA and HTR2A): association and interaction with childhood trauma and parenting ...
Lack of association between the Serotonin Transporter Promoter Polymorphism (5-HTTLPR) and Panic Disorder: a systematic review and meta-analysis ...www.connotea.org/user/danielstjepanovic/tag/5-HTTLPR
European Journal of Human Genetics (2004) 12, 377–382. doi:10.1038/sj.ejhg.5201149 Published online 21 January 2004
Serotonin transporter 5HTTLPR polymorphism and affective disorders: no evidence of association in a large European multicenter study
Le polymorphisme, 5HTTLPR et schizophrénie : un facteur de risque pour les com. I.47, e G-alpha-olf dans le striatum de rats lésés à la ...www.neurosciences.asso.fr/Activites/colloques/SN03/posters/McleAl1.html
5-HTTLPR Genotype-Specific Phenotype in Children and Adolescents With Autism. Camille W. Brune, Soo-Jeong Kim, Jeff Salt, Bennett L. Leventhal, ...pagesperso-orange.fr/autismetedcb/Documents/CRAA/08.pdf
Zhong N, Ye L, Ju W, Brown WT, Tsiouris J, Cohen I (1999) 5-HTTLPR variants not associated with autistic spectrum disorders. Neurogenetics 2:129-131. ...www.exploringautism.org/french/genetics/articles.htm
Le mot de la fin :
14-11-2008
There has been a large but inconsistent literature on interactions between the 5-HTTLPR polymorphism of the serotonin transporter gene and adversity on emotional disorders.
https://ilis-etu.univ-lille2.fr/~qualis/index.php?option=com_content&task=view&id=1154294&Itemid=88888893
Une littérature vaste mais inconsistante, en effet.
Cela montre petit un qu'on n'en sait foutre rien si cet allèle a un effet ou pas.
Petit deux qu'il ne faut pas croire tout ce que raconte l'AFP (ce dont on se doutait déjà) ni même ce que raconte l'INSERM.
Mais le plus important, surtout pour les gens que le gène de l'anxiété intéresse aussi peu que les résultats du tournoi inter-provincial de curling de Calgary, c'est qu'il montre la science en marche, des expériences qui donnent des résultats que d'autres équipes essaient de répliquer.
Et n'arrivent à rien et le disent. Parfaite illustration des fondations de la méthode scientifique, l'hypothèse et la réfutation.
C'est beau de voir les chercheurs s'exciter sur un petit bout du chromosome 27.
Bonne chance 5-HTTLPR, on finira bien par savoir ce que tu fricotes avec la sérotonine !